L’enfant au berceau

 

 

Craintif, j’ai soulevé les plis du rideau rose.

Il sommeille, et sa lèvre exhale un si doux bruit

Que, nous figurant être en un bosquet, la nuit,

Nous croirions tous ouïr respirer une rose.

 

Qu’il est coquet ainsi ! la bouche demi-close,

Ses blonds cheveux épars, un bras nu hors du lit !

En voyant tant de grâce, on sent que Dieu nous dit :

L’enfant est une fleur en mon parterre éclose.

 

Dors, mignon ! Si le vent veut souffler, ne crains rien.

S’il peut briser un chêne orgueilleux, il sait bien

Qu’un lis ne dresse point une tête rebelle.

 

Dors, ange d’innocence, ignore les combats

Que le Bien et le Mal se livrent ici-bas :

Car, vers le Ciel, sitôt tu fuirais d’un coup d’aile.

 

 

 

Raoul BONNERY.

 

Paru dans L’Année des poètes en 1895.

 

 

 

 

 

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