Ferme-toi, mon cher livre !

 

 

Enfin – Dieu soit béni ! –

Mon voyage sur terre,

Long qu’il fût, est fini ;

C’est le temps de me taire.

À quel sombre transport

Veux-tu que je me livre ?

Voici que j’entre au port.

Ferme-toi, mon cher livre !

 

Ma vie où j’ai souffert

D’une âme résignée,

Je l’ai, sous ton couvert,

Dans mes « Chants » consignée.

C’en est fait : désormais

Nul mal ne peut me suivre

Au sépulcre où je vais.

Ferme-toi, mon cher livre !

 

Rien de triste en la paix

Où je me vois descendre ;

Dans la tombe, je sais

Qu’on renaît de sa cendre.

Mes péchés ? Un Dieu bon

Lui-même m’en délivre,

J’ai reçu le pardon.

Ferme-toi, mon cher livre !

 

En paradis, de tout

L’on se souvient encore

Et pour les siens surtout

Dieu permet qu’on l’implore.

Mais plus d’adversité :

D’amour Il nous enivre

Pendant l’éternité.

Ferme-toi, mon cher livre !

 

Oh ! viens, Dernier Sommeil,

Viens, viens, Repos suprême !

C’est pour le grand réveil

Au ciel où l’on s’entr’aime,

Que ta main nous endort.

Heureux qui sut bien vivre,

Pour lui douce est la mort !

Ferme-toi, mon cher livre.

 

 

 

Georges-A. BOUCHER,

Chants du Nouveau Monde, 1946.

 

 

 

 

 

 

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