Muse, tu peux venir, j’attends
Verbe d’en haut, souffle céleste,
Ô divine inspiration !
Toi qui du vers le plus modeste
Sais faire une création ;
Toi qui donnes à l’ode ailée
Son haleine et son envolée
Et la fais vivre, c’est le temps !
Quel que soit l’illustre martyre
Dont tu marques notre délire,
Muse, tu peux venir, j’attends.
Et que deviendrait ma pensée
Si tu n’aidais à l’exprimer ?
Une strophe pâle et glacée
Que rien ne saurait animer.
Pur Esprit ! sans toi le poète
S’épuiserait en vains efforts ;
Et son œuvre, terne et muette,
N’enfanterait pleurs ni transports.
Car c’est par toi qu’un vers enchante
Et qu’il ne rime pas en vain,
Seul tu mets sur tout ce qu’il chante
Un cachet durable et divin.
Seul tu lui confères la vie,
Et cette immortelle beauté
Devant laquelle s’extasie
Et rêve la postérité.
Oui, malgré le coût de la lyre,
Malgré les malheurs éclatants
Qui furent nôtres de tous temps,
Souffle céleste, ô saint délire !
Apparais, apparais, j’attends.
Georges-A. BOUCHER,
Chants du Nouveau Monde, 1946.