Fin de mai
Ce soir, j’écoute le vent qui monte dans l’azur,
– Une brise âpre qui secoue des paysages –
et je prie en racontant mes vers.
Ô Dieu ! Vous savez, vous savez ce que j’aime...
Même si je souffre je rêve de bien vastes projets.
Maître des âmes, je vous les donne :
croire à la vie, coudoyer le mystère ;
détourner les affronts pour y placer l’amour ;
boire aux illusions, courir à la cime ;
d’une vigueur fantastique montrer le devoir ;
monter vers un sort qui ne m’est pas dévolu ;
espérer dans l’amour, assouvir mon dessein ;
le front chaste et pur rayonner la beauté ;
m’éloigner de la fange, habiter la splendeur ;
maîtriser le désir dans un cœur passionné...
Et que ne suis-je un poète pour imiter les Muses,
m’emparer du silence pour créer des émois,
divulguer la hauteur d’un splendide horizon !
Le vol audacieux ne saurait m’effrayer...
Je suis l’être de passion, avide, insatiable.
Quel affreux mélange !
L’homme étrange que je suis !
Et l’orgueil de mon rêve me ferait délirer...
Je vis sur la terre et non pas comme les anges !
Un autre destin m’est par Dieu décrété.
Il a fallu du sang pour restaurer la terre ;
il faut donc la souffrance pour ranimer les cœurs !
Pour abolir la haine et mériter l’espoir.
J’ai compris. Je sais malgré tout.
J’ai compris et je ne suis pas seul...
Eddy BOUDREAU, La Vie en Croix.