Si qu’y r’viendrait

 

 

Si qu’y r’viendrait Jésus

Se demandait Jehan Rictus...

Si qu’y r’viendrait le doux Cyrénéen,

Il prendrait le chemin

Qui mène au cimetière et mène à mon église ;

Il irait se placer dans la plus simple mise,

Entre un gueux béquillant et portant la besace

Et quelque mécréant à l’âme lasse ;

Peut-être moi, sait-on jamais ?

Puis il prierait...

Alors, comme au temps d’Ézéchiel,

On entrerait dans le surnaturel...

Du vieux chantre la voix deviendrait cristalline,

L’enfant de chœur, dans son émoi,

Oublierait de gainer ses doigts

Dans ses narines.

Tout au long de la messe,

Même sur son bréviaire

Le bon curé tiendrait ouvertes ses paupières.

Et les chevaux, les moutons, les ânesses

Ainsi que maintes volatiles

Aux fidèles mêlés,

Feraient du saint asile

Comme un paradis retrouvé...

Sans fausses notes

Chanteraient les dévotes

Et la bonté, la charité

Dans les vieux cœurs ratatinés

Refleuriraient de telle sorte

Que, plus tard, on verrait du seuil de la grand’porte,

Ô miracle imprévu,

Le plus grand de tous ceux que fit jamais Jésus,

Rire et danser aux bras des filles-mères

Les bigotes et les rosières !

 

 

 

Lucien BOUDET.

 

Recueilli dans Les poètes de la vie :

œuvres inédites d'auteurs contemporains,

choix de Louis Vaunois et Jacques Bour, 1945.

 

 

 

 

 

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