Trouvaille
J’avais trouvé sur la route
Un pauvre pigeon blessé ;
Son sang coulait goutte à goutte
Lorsque je le ramassai...
Je lavai ses plumes blanches
Dans les larmes de mes yeux,
Qui ne sont pas des pervenches,
Mais qui savent pleurer mieux.
Un doux oiseau que l’on trouve
Tout sanglant sur le chemin,
Qui demande qu’on le couve
... Et le cache dans la main,
La délicieuse chose !
Je le plaçai sur mon cœur
Qu’un rayon du grand ciel rose
Emplissait de sa lueur !
Il portait une blessure
Que je fermai d’un baiser :
Le baiser chante ou murmure ;
– Le mien dut agoniser... –
Ma lèvre trembla d’angoisse
En effleurant mon amour :
Il est des choses que froisse
Le souffle embaumé du jour.
Sous une lèvre de flamme
L’oiseau blessé peut mourir...
Femme, embrasse avec ton âme :
Tu sauras l’art de guérir...
Mon doux captif, à cette heure,
Plane dans l’azur du ciel,
Et, chaque fois que je pleure.
Il le dit à l’Éternel !
Marie BOULANGER.
Paru dans L’Année des poètes en 1895.