Les poètes
Il est des êtres sur la terre
À qui, la destinée, hélas ! n’a pas souri ;
Pleins d’attirance en leur mystère,
Ils cachent aux regards un cœur endolori.
Leur âme est une sensitive
Hésitante, troublée, et tremblante de peur
Devant une souffrance vive,
Comme devant le plus légitime bonheur.
Elle fut trop longtemps bercée
De la même chimère et du rêve ingénu.
Sa croyance s’est effacée,
Dans le magique amour qui n’est jamais venu.
Parfois une révolte brève
Les secoue, impuissants et farouches dompteurs,
De n’avoir pu vivre le rêve
Qui les faisait jadis fiers et triomphateurs.
Parfois aussi, dignes et fières,
Ces âmes de poètes ont d’étranges dédains ;
Et de leurs ardentes prières
Jaillissent les espoirs en des bonheurs divins.
Luce de BRIE.
Paru dans L’Année poétique en 1906.