Croix
du chemin
D’un geste qui ne finit pas,
De grands Christs solitaires
Étendent, jour et nuit, leurs bras
Sur nos campagnes claires.
Le vent et l’eau les ont noircis,
Et sur les têtes qui s’inclinent
On pense voir des cheveux gris...
Les croix sont peut-être chagrines ?
Les yeux eux-mêmes se sont clos ;
Car l’araignée y fait ses toiles.
La nuit en guise de joyaux,
Y met semble-t-il des étoiles.
Mais lorsque souffle le grand vent,
Les croix résistent avec peine ;
Et par les froids d’hiver, souvent,
Les croix grelottent dans la plaine.
On les voit de loin, de très loin ;
Chacune d’elles nous attire
Et par-dessus les champs de foin,
Elles ont l’air de nous sourire.
Ces croix nous viennent des aïeux.
Tandis qu’ils « faisaient de la
terre »,
On dit qu’elles priaient pour eux :
Le ciel a béni leur prière...
Conservons nos croix du chemin :
De victoire elles sont un gage.
Et nous les remettrons, demain,
À nos enfants, en héritage.
Jean
BRUCHÉSI.