Le fou dans le tonneau
Ils disent que je suis fou et voilà qu’il pleut.
Je dérive sur l’eau et je m’amuse un peu.
Dieu, dans sa charité, nous donne ce qu’il faut :
vous avez des maisons, et moi, j’ai un tonneau.
Les hommes quelquefois viennent me regarder
et rient à pleine gorge alors lorsque je ris.
Je ne sais pas quel but je me suis assigné,
mais je hisse déjà la bannière fleurie.
La nuit, je vogue, solitaire, au fil de l’eau.
Une étoile parfois fend sans bruit l’étendue ;
je la trouverai bien plus tard et à propos,
bien que je sois toujours aussi loin de mon but.
Frans BUYLE, La pierre philosophale.
Recueilli dans Anthologie de la poésie néerlandaise
de Belgique (1830-1966),
choix de textes et traduction par Maurice Carême,
Aubier-Montaigne, 1967.