L’enfant
Tu as sept ans et tu vas à l’école
Tes vêtements sentent la colle
De menuisier
Tu as rempli de fleurs champêtres ton plumier
Tu marches lentement en évitant la fange
Tu as des étoiles dans tes cheveux qui te démangent
Tu regrettes un peu l’odeur des grands sapins
Tu voudrais t’arrêter et partager ton pain
Avec la petite fille qui passe
Tu n’es pas toujours le premier en classe
Tu es bavard
Tu dessines des chats sur ton papier buvard
Tu regardes souvent le ciel par la fenêtre
Tu rêves à de bons bergers qui t’ont vu naître
Mais tu sais lire aussi et déjà dans le vent
Tu découvres tout seul des tas de mots savants
Des mots qui prononcés font du bien à tes lèvres
Tu sais tresser le jonc et conduire les chèvres
D’un geste simple et doux apaiser les chevaux
Bruire comme un laurier pour consoler l’oiseau
Tu aimes caresser le front blanc de ta mère
Tu es l’Enfant que je vénère
Tu es bien le Fils de mon Dieu
René Guy CADOU, Les amis d’enfance,
Seghers, 1965.