La foi
Vois ce savant : il a, trente ans, sous son scalpel
Tenu le corps humain, prouvant à l’évidence
Que ce qu’on appelle âme avec tant d’impudence
N’a point de place au sein de l’homme naturel ;
Mais aujourd’hui que, las ! par un destin cruel,
Celle qu’il adorait, sa douce providence,
Gît livide à ses pieds, doutant de sa prudence,
Il pleure et croit soudain en un être immortel.
Il croit, parce qu’il aime. Oh ! le cœur en délire,
À l’instar du condor qui vers le ciel aspire,
Laisse la plaine aride au loin derrière lui.
Enfant de l’amour, Foi, ta vision abstraite
Achève la science à jamais imparfaite :
Heureux le penseur grave en qui ton jour a lui !
Armand CAUMONT.
Paru dans L’Année des poètes en 1895.