Le Soleil

 

 

Soleil, astre sacré, contemple ton empire !

Tout vit par tes regards, tout brille, tout respire :

Souverain des saisons, le monde est ton palais,

Les globes sont ta cour et le ciel est ton dais ;

Notre terre à tes yeux sans fin se renouvelle,

Et roulant nos débris sur sa route éternelle,

Le temps emporte tout, mais il ne l’atteint pas.

Les révolutions, longs tourments des états,

Ébranlent notre globe et te sont étrangères.

Tu n’es jamais troublé du bruit de nos misères ;

Et ton front, toujours calme, éclaire les tombeaux

Des peuples dont tu vis s’élever les berceaux.

Qui pourrait s’égaler à ta vaste puissance ?

Ta présence est le jour, la nuit est ton absence ;

La nature sans toi, c’est l’univers sans Dieu.

Père de la nature et des vents et du feu,

Renfermant dans les plis de ta robe éclatante.

Le rubis l’émeraude, et l’opale inconstante,

D’une pluie à jets d’or inonde l’univers,

Et la décomposant dans le prisme des airs,

Nuance des saisons la mobile ceinture,

Suspend au front des bois un réseau de verdure,

Et prodiguant partout un luxe de couleurs,

Dore, argente ou rougit le panache des fleurs,

Donne un habit de neige au lis qui vient d’éclore,

Et l’arc-en-ciel au paon, et la pourpre à l’aurore,

Et garde pour les cieux ce pavillon d’azur,

Ce manteau de saphir d’où s’échappe un jour pur,

Et que la vaste mer réfléchit dans son onde.

Voilà comme par toi se décore le monde.

 

Ah ! de quel saint transport mon cœur est agité,

Grand astre, quand tes feux dans l’air ont éclaté !

Soleil, quelle est ta pompe ! Oui, lorsque ta lumière,

Symbole radieux de la beauté première,

Enflamme les forêts, les monts et les déserts,

Brille et se multiplie en flottant sur les mers,

Je crois voir de Dieu même, au sein de son ouvrage,

Partout se réfléchir la glorieuse image ;

Et, dans l’ombre du soir ton globe moins ardent

Vient-il à se pencher aux bords de l’occident

Qu’avec respect encor j’y retrouve l’emblème

Du souverain Moteur lorsqu’il fixe lui-même

     À la création un terme limité,

Et rentre dans la nuit de son éternité !

 

 

Charles-Julien Lioult de CHÊNEDOLLÉ.

 

Recueilli dans

Choix de poésies morales

et religieuses, 1837.

 

 

 

 

 

 

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