Prélude
Si les hommes voulaient écouter les poètes,
– ces grands cygnes mourant de leurs chants sans échos
ils sentiraient passer au-dessus de leurs têtes
les ailes de la Paix sans le deuil des héros !
M. C. (Sortilèges de la Paix chantante, 1938, Paris, et Choix
de Poèmes, 1950, Stockholm).
Nous nous serons cognés aux barreaux du destin,
barreaux faits de l’acier de tous nos égoïsmes
et des masques haineux appliqués par nos schismes
et l’orgueil éloignant les hommes du Divin.
Nous gardons dans nos cœurs de brumes envahis
l’adorable et très vieille et haute nostalgie
d’un paradis perdu que nos fausses magies
tentent de recréer pour nos désirs trahis.
Par carence d’amour et de fraternité
nous sommes les errants de froides solitudes.
Nous sommes enserrés dans nos inquiétudes
et nos ombres s’en vont quêtant l’éternité.
Nos âmes pour chanter ont besoin de douceur,
Quelquefois un poète, un savant, un artiste
et parfois même un saint, sur nos routes si tristes
fixe ici-bas un feu qui réchauffe nos cœurs.
Et nous allons ainsi dans les sentiers du temps,
aveugles révoltés ou soumis aux ténèbres,
hantés d’un souvenir qui ne soit pas funèbre
et d’une ère de paix au soleil éclatant.
Tant de morts sont en nous et de vivants futurs !
Car il nous manque un astre à créer en nous-mêmes.
Il nous faut remporter la victoire suprême :
la dignité de vivre et l’honneur d’un front pur.
Et face à l’inconnu de lointains lendemains
réapprendre le sens immense de la vie
et tracer, unissant enfin nos énergies,
aux siècles qui naîtront de fraternels chemins.
Marc CHESNEAU.
Paru dans Art et poésie, reflets poétiques de l’ethnie française,
Anthologie des membres titulaires, agrégés d’honneur de la
Société des poètes et artistes de France,
sous la direction littéraire de Henry Meillant,
Jean Grassin éditeur, 1968.