Bois

 

 

Les enfants qui s’allongent pour jouer

font du bois du plancher

la mer avec ses îles

la terre avec ses routes

partout champ de bataille où triompher

et les morts se relèvent dans un sourire

 

Allonge-toi près d’eux dans le secret des arbres

Contre le bois rugueux desquame tes peaux mortes

et la joie t’envahit

l’innocence de vivre

le paradis sphérique de l’instant

 

Rappelle-toi pourtant

toute la nuit parmi les oliviers toscans

ils se traquèrent, chacun

chasseur et fauve exaspérés

Le bois humide d’aube

le fut de sang

et tant de femmes durement clouées

par l’étrave du sexe

aux planchers effondrés

 

Et l’autre, quand on l’allongea

sur les deux arbres

que voyait-il ? Ni la graminée

dont le moine zen scrute l’empreinte sur le vide

Ni la pierre où l’alchimiste veut conjoindre

les bois écartelants

Ni le ciel qui pourtant se déverse

dans le saphir du cœur

Que voyait-il ? la face du bourreau

c’est-à-dire l’absence du Père

dont il fut alors l’icône exacte

 

 

 

Olivier CLÉMENT,

Déracine-toi et plante-toi dans la mer,

Éditions Anne Sigier, 1998.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

www.biblisem.net