L’Angelus
La brume à l’orient a déchiré ses voiles.
L’aube en son char d’argent chasse l’obscurité,
Et de l’azur plus clair de son immensité,
Le ciel a de nouveau retranché les étoiles.
Le phare au bout du cap subitement s’éteint.
Le flot vient caresser le sable de la grève,
Et dans le jour naissant légèrement s’élève
Au-dessus du hameau l’Angelus du matin.
Le soleil va finir sa course accoutumée,
Car un jour est bien peu dans le Temps qui s’enfuit !
Et les vallons discrets se fondent dans la nuit,
Tandis qu’au couchant meurt une pourpre enflammée.
La vague vient hurler tout le long du musoir ;
Les sapins et les rocs sont pleins de voix grondeuses,
Et mon cœur est étreint lorsque à travers les yeuses
Sanglote lentement l’Angélus dans le soir.
Francis CLERC, Les heures perdues, 1924.