L’Éden d’amour

 

 

Loin... Loin... par les mers, dans une île blanche

Où n’ont abordé jamais d’exilés,

Tous les Beaux Amants se sont envolés –

Comme un essaim d’or qui fuit d’une branche –

Dans le ciel d’avril ils s’en sont allés.

 

La neige des fleurs, éternelle et rose,

Sous leurs pas rêveurs ne se fond jamais,

Et sous le couvert des bois parfumés

Jamais on n’entend l’oiseau qui se pose

Au bord des chemins où vont les Aimés.

 

Pour les endormir, le soir, les poètes

Viennent leur chanter des chansons d’amour

Et les séraphins passent, à leur tour,

De leur aile blanche effleurant leurs têtes

Pour les éveiller à l’aube du jour.

 

Et l’Île d’Amour éroule ses phases,

Loin du Paradis des Saints à genoux,

Et Dieu, détournant son regard si doux

Pour ne pas troubler leurs pures extases,

La cache aux Élus qui seraient jaloux.

 

C’est là qu’une nuit, par les clairs de lune,

Nous irons tous deux, la main dans la main,

Et je cueillerai, dans l’albe jardin,

Pour diamanter vos cheveux de brune,

Des étoiles d’or sur notre chemin.

 

Nous aborderons vers la blonde grève

De l’Île d’Amour, et les Bienheureux,

En voyant vos yeux si purs et si bleus,

Nous emmèneront dans les bois du Rêve

Où nous aimerons à jamais, comme Eux.

 

 

 

Claude COHENDY.

 

Paru dans L’Année des poètes en 1895.

 

 

 

 

 

 

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