Regina Coeli
Saint Jean voit une femme en beauté singulière :
Le soleil la revêt de ses propres rayons ;
La lune est sous ses pieds avec même lumière
Qu’en son plus grand éclat d’ici nous la voyons ;
Douze astres forment sa couronne ;
Et si tant de splendeur au-dehors l’environne,
Ce que le dedans cache est encor plus exquis ;
Elle est pleine d’un fils qu’à peine l’on voit naître
Qu’aussitôt le souverain Maître
Lui fait place en son trône et le reçoit pour fils.
Est-elle autre que toi cette femme admirable ?
Et son lumineux appareil
D’astres, de lune et de soleil,
N’est-il pas de ta couche un apprêt adorable ?
Est-ce une autre que toi que de tous ses trésors
Et remplit au-dedans et revêt au-dehors
Le brillant Soleil de justice ?
Et fait-il commencer par une autre en ces lieux
Ce royaume de Dieu si doux et si propice,
Qui réunit la terre aux cieux ?
La milice du ciel, qui sous tes lois se range
Comme la lune sous tes pieds,
Y fait incessamment résonner ta louange
Et sert d’illustre base au trône où tu te sieds ;
De tes plus saints aïeux la troupe glorieuse
Fait la couronne précieuse
Des astres qui ceignent ton front ;
Le nombre en est égal à celui des apôtres
Et nous donne l’exemple et des uns et des autres
Pour être un jour par toi près de Dieu ce qu’ils sont.
Cette plénitude étonnante
Des grâces, que sa main sur toi seule épandit,
Joint à tant de vertus, joint à tant de crédit
La gloire de la voir toujours surabondante.
Vierge par excellence et mère du Très-Haut.
Toujours sans tache et sans défaut,
Lumière que jamais n’offusque aucun nuage,
De tant de plénitude épands quelque ruisseau
Et de tant de splendeurs dont brille ton visage
Laisse jusque sur nous tomber un jour nouveau.
Pierre CORNEILLE.