Hymne à la Lumière

 

 

Ton regard fier et gai du brillant char lunaire

      Parcourt ton bois étincelant d’étoiles ;

      Et tout l’an tu apportes avec toi

Ton nocturne printemps de lumineuses fleurs.

 

Tel le Scythe, autour de ton domaine céleste

      Tu promènes le soleil, tente d’or,

      Et toujours, quand tu marches en ta pompe,

Le cortège éclatant du monde suit tes pas.

 

Tu ne dédaignes point, parmi tous ces triomphes,

      D’illuminer les humbles vers luisants,

      Dorant de ces paillettes animées

(Ô grandeur sans orgueil !) les buissons des campagnes.

 

Tu mets en fuite, avec la Nuit, ses laids suppôts,

      Et le sommeil, son hibou paresseux ;

      Tout honteux et redoutant de paraître,

Ils se cachent, affreux, dans le sombre hémisphère.

 

Avec eux court, saisi d’une terreur panique,

      L’essaim bruyant des rêves bigarrés ;

      Dès le moment où tu ouvres les yeux,

Les amas se défont, les vieux atomes fuient.

 

Les coupables serpents, les bêtes plus obscènes,

      Rampent craintifs à leurs secrets abris ;

La Nature te montre son respect,

Chasse présage et vue fâcheuse de ta route.

 

Quand tu parais, le chagrin même, ainsi l’on dit,

      Agite l’aile, et relève la tête ;

      Et le noir souci a souvent reçu

Du rayon de tes yeux le reflet d’un sourire.

 

Quand tu parais, la crainte même s’enhardit ;

      Ton clair soleil fond et détruit sa glace.

      Le courage se ranime à ta vue,

La joue reprend couleur, le genou s’affermit.

 

Déesse, quand ton front réveillé se soulève

      De la couche de pourpre du matin,

      Ton chœur d’oiseaux près de toi fait musique,

Et l’univers joyeux salue un jour levant.

 

Tous les atours du monde où nos yeux se réjouissent

      Ne sont que tes différentes livrées,

      C’est toi qui leur donnes leurs riches teintes,

Ton agile pinceau peint la terre en ta course.

 

Tu portes, dans la rose, une robe incarnate ;

      Ta couronne est couverte de clous d’or ;

      Les lys vierges et blancs ne sont vêtus

Que du linon d’une lumière presque nue !

 

 

 

Abraham COWLEY.

 

Traduit par Louis Cazamian.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

www.biblisem.net