Le Christ
LE JUGEMENT DERNIER.
Alors, avec terreur soudaine, sur les terrestres habitants,
le grand jour du puissant Seigneur
à minuit, s’abattra pesamment
sur la brillante création, tout comme le brigand sournois,
le hardi voleur, qui voyage dans les ténèbres,
dans la nuit sombre, surprend tout à coup
le mortel insouciant plongé dans le sommeil
et malignement attaque les hommes impréparés...
… La création profonde résonnera, et devant le Seigneur marchera
le plus grand des feux tourbillonnants sur la vaste terre.
Elle bondira bruyamment, cette flamme brûlante; les cieux voleront en éclats,
et tomberont les étoiles stables et scintillantes.
Alors le soleil deviendra sombre
de la teinte du sang, lui qui lumineusement luisait
sur l’ancien monde pour les fils des mortels.
La lune elle-même qui, jadis, pour l’humaine race,
brillait la nuit, dans l’abîme ira choir,
et les planètes encore se précipiteront du ciel,
à travers la puissante rafale, battues par la tempête...
Ainsi l’esprit avide parcourra les terres,
et la flamme ravageuse, les édifices élevés.
Sur la plaine terrestre, de la terreur du feu,
le tourbillon partout connu, en même temps remplira le monde,
chaud et dévorant. À l’envi s’écrouleront
les murs démolis des cités. Les collines fondront
et fondront les hautes falaises qui jadis, contre l’océan,
contre les flots, fermement protégeaient la terre,
remparts immuables et roides contre les lames,
la houle déferlante. Alors ce feu de mort saisira
toute créature vivante, bêtes ou oiseaux;
la flamme ténébreuse courra sur la terre,
guerrier furieux. Là où jadis coulaient les flots,
les vagues pressées, dans un bain de feu
brûleront les poissons d’océan, sevrés d’onde.
Accablés les monstres de mer mourront
et l’eau brûlera comme de la cire.
CYNEWULF.
Traduit par Marguerite-Marie Dubois.
Publié dans l'Anthologie de la poésie anglaise,
par Louis Cazamian, chez Stock, en 1946.