Amitié
Rien n’est si propre à l’homme,
Rien si bien ne lui convient,
Que de se montrer fidèle,
Et tenace en amitié.
Lorsqu’il noue des liens durables
Avec l’un de ses semblables
Il jure d’y jamais manquer,
Du cœur, de la bouche, de la main.
La parole nous fut donnée
Pour que nous ne dussions vivre
Uniquement pour nous-mêmes
Et nous tenir loin des gens.
Nous devons nous questionner
Et pourvoir à bon conseil,
Et déplorer chez l’un, l’autre,
La douleur qui l’a frappé.
Que peut accomplir la joie
Qui masque une solitude ?
On rit des récits deux fois
Qu’on rapporte à des amis.
Qui la dit de tout son cœur
Peut oublier sa douleur ;
Et qui se ronge en secret,
Se mangera tout entier.
Dieu est au-dessus de tous
Ceux qu’aime mon âme ;
Puis me plaît pareillement
Qui cordialement à moi se donne :
Ligué à ce compagnon,
Je ris de peines et douleurs,
Je descends au fond d’Enfer,
Et passe à travers la mort.
J’ai, j’ai des cœurs très fidèles,
Fidèles comme il convient,
Que ne touchent en conscience
Fausseté ni insouciance !
Je les ai aussi, en retour,
Du fond de l’âme en ma grâce,
Je vous aime plus, mes frères,
Que l’or de toute la terre.
Simon DACH.
Recueilli dans Anthologie bilingue
de la poésie allemande,
Gallimard, 1993.