Le peuple errant dans les ténèbres
voit une grande lumière
Inspiré du chapitre IX du Livre d’Isaïe
Nous qui restâmes si longtemps
Dans l’ombre de la mort,
Sans un éclaircissement,
Aveugles aux choses de Dieu,
Et ne pouvions rien comprendre
À la Grâce, au jugement,
Nous voyons par-dessus nous
Une grande lumière aujourd’hui.
Une lumière par laquelle,
Nous voyons dans le cœur de Dieu,
Qu’en sa très grande confiance
Il veut être maintenant le nôtre.
Une lumière qui brûle fortement
Dans notre chair et notre sang,
Pour qu’un homme s’y reconnaisse
Et tous les péchés qu’il commet.
Une lumière qui soudain descend
Au fond de la nuit des tombes,
Et nous éclaire sur la mort
De toute sa puissance,
Qui nous montre l’Enfer
Et tout ce qui s’y trouve,
Où Satan s’aperçoit
Et toute sa malice,
Qui par-delà lune et soleil
Pénètre jusque dans le ciel
Et nous fait clairement voir
La félicité des anges,
Qui nous donne à contempler
Que monde et temps ne sont rien,
Et combien pour tous rayonne
L’éclat de l’Éternité.
Qui fut le désir et l’attente
De nos pères autant qu’ils furent,
Elle s’est levée pour nous
Au fond d’une étable obscure ;
L’enfant nous est né,
Le fils nous est offert,
Par qui Dieu maintenant se tourne
Vers nous miséricordieux ;
Par qui nous sommes guéris
De notre grande misère,
Qui mille fois et plus nous a
Bien souvent fait mourir ;
Par qui nous sommes ôtés
À la gêne et au péril,
Et entrons en communauté
De l’armée pure des Anges.
Ô petit enfant, ô plante
De la vraie félicité,
Brillante clarté de la clarté,
Engendrée avant l’aube des temps,
C’est à toi que nous pensons,
Toi la lumière essentielle
Par quoi Dieu fait resplendir
Le visage de sa grâce.
Que pourrai-je te montrer
Qui signifie tant d’amour ?
Que peut détenir un homme
Qui ne soit déjà toujours tien ?
Tu veux avoir les cœurs,
Sauveur, je t’offre celui-ci
Pour toutes tes bontés,
Je n’ai rien de meilleur.
Ô, Seigneur, qu’il te plaise,
D’en faire ta grande salle,
Éclaire-le devant tous,
Des rayons de ton esprit ;
Aide-moi à repérer la juste voie
De ma félicité,
Et des œuvres obscures
En tout temps garde-moi.
Quand enfin j’irai dans les ombres
De la mort, précède-moi,
Ô, lumière, viens m’assister
Et mène-moi dans les cieux ;
Tourne effroi, peur, manque de force,
Permets que je voie ta beauté
Et tout ce qu’il y a là-bas,
Qui n’est ici qu’espérance.
Simon DACH.
Recueilli dans Anthologie bilingue
de la poésie allemande,
Gallimard, 1993.