Noël intime

 

 

Oh ! qu’ils furent heureux, les pâtres de Judée,

Éveillés au buccin de l’Ange triomphant,

Et la troupe des Rois par l’Étoile guidée

Vers le chaume mystique où s’abritait l’Enfant !

 

Tous ceux qui, dans la paix de cette nuit agreste,

Trouvèrent le Promis, le Christ enfin venu,

Et ceux même, ignorants de l’Envoyé céleste,

Qui L’avaient repoussé, mais du moins L’avaient vu !

 

La Mère, s’enivrant d’extase virginale,

Joseph, pour qui tout le mystère enfin a lui,

Et l’étable, et la crèche, et la bise hivernale

Par les vieux ais disjoints se glissant jusqu’à Lui !

 

Tout ce qui Le toucha dans sa chair ou son âme,

Tout ce que son rayon commença d’éblouir,

Princes savants, bergers pieux, Hérode infâme,

Tout ce qui crut en Lui, fût-ce pour Le haïr !

 

Oh ! qu’ils furent heureux ! Moi, dans l’ombre muette,

Je m’assois, pasteur morne et blême de soucis,

Et jamais un Archange à ma veille inquiète

Ne vient jeter le Gloria in excelsis.

 

Je scrute le reflet de toutes les étoiles,

Mage pensif, avec un désir surhumain,

Mais leur front radieux n’a pour moi que des voiles

Et pas une du doigt ne me montre un chemin.

 

Et mon âme est la Vierge attendant la promesse,

Mais que ne touche point le souffle de l’Esprit,

Ou le vieillard en pleurs qu’un sombre doute oppresse

Et qui n’a jamais su d’où venait Jésus-Christ.

 

Je suis l’étable offrant en vain son sol aride

Au Roi toujours lointain et toujours attendu ;

Et dans mon cœur voici la crèche, berceau vide,

Où le vent froid gémit comme un espoir perdu.

 

 

 

Louis DANTIN.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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