Le réveil de l’enfant

 

 

À mes fils, Gaston, Robert et Louis

 

 

Dans la forêt verte et mouillée,

Et sous la légère feuillée

Bercée au souffle du printemps,

Il est doux d’entendre à l’aurore,

Sur les monts que le soleil dore,

S’éveiller les oiseaux chantants.

 

Sur les pelouses arrosées

Par les bienfaisantes rosées,

Il est doux de voir chaque fleur

Ouvrir son humide corolle,

D’admirer sa fraîche auréole

Et le charme de sa couleur.

 

Mais il est bien plus doux encore

D’écouter le babil sonore

Et le beau rire étincelant

Du petit enfant qui s’éveille,

Leste et dispos comme l’abeille,

Dans sa couchette au rideau blanc.

 

Dès qu’aux volets de la fenêtre

Un clair rayon filtre et pénètre,

Chassant devant lui le sommeil,

L’enfant se réveille et demande

Qu’on l’ouvre vite toute grande

Pour faire entrer le jour vermeil.

 

Puis le voici qui jase et cause,

Chante et rit, sans trêve et sans cause,

Comme gazouillent les oiseaux.

Franche gaîté, joie enfantine !

Ainsi bruit l’onde argentine

Du plus limpide des ruisseaux.

 

Reposé par la nuit entière

Il est blond comme la lumière,

Souriant comme le matin,

Et jamais la rose naissante

N’eut de sa joue éblouissante

Le frais velours, le doux satin.

 

Comme une étoile qui scintille

Son regard vif rayonne et brille,

Sa voix a la douceur du miel ;

Quand, sur les genoux de sa mère,

Mains jointes il dit sa prière,

On croit voir un ange du ciel.

 

Et c’est un bonheur sans mélange

Lorsqu’il vient, le cher petit ange,

À mes baisers offrir son front

– « Bonjour, mignons ! » – « Bonjour, mon père !

Nous vous amenons petit frère,

Embrassez-nous bien tous en rond. »

 

Et, ravi de leur bonne grâce,

Bien tendrement je les embrasse,

Ces fronts purs qui n’ont pas un pli ;

Et l’un des trésors de ce monde

Est la joie intime et profonde

Dont mon cœur alors est rempli.

 

Mais c’est vous que je remercie,

C’est vous que mon cœur associe

À sa joie, ô Dieu tout-puissant !

Ô vous que je nomme mon Père,

Bénissez l’enfance si chère

De mon beau trio florissant !

 

 

 

Gaston DAVID.

 

Paru dans Poésies de l’Académie

des muses santones en 1895.

 

 

 

 

 

 

 

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