Consoler
Il faut si peu pour consoler,
Pour rendre moins lourde une peine,
Calmer une détresse humaine,
Et faire un chagrin s’en aller.
Pour arrêter au bord d’un gouffre,
Rendre moins triste quelque temps,
Faire sourire un peu d’instants
Et forcer d’oublier qu’on souffre.
C’est si facile ; il faut si peu !
Chacun a tant besoin de joie
Qu’avidement, comme une proie,
Vite il en saisit ce qu’il peut,
Il n’est pas besoin d’être habile ;
Parfois un mot de réconfort
Peut adoucir ou rendre fort :
Il faut si peu, c’est si facile !
Une parole de pitié,
C’est parfois tout ce que réclame
Pour s’épanouir un peu l’âme
Et pour refleurir à moitié.
Tel, la mère avec son haleine
De son enfant chasse le mal,
Vous êtes un baume vital,
Souffle de la parole humaine.
Vous pouvez endormir les maux
D’un don magnétique ô parole,
Souvent la Douleur se console
Facilement avec des mots.
Les mots clairs font fuir les alarmes,
Les mots clairs chassent les rancœurs,
Les mots purs guérissent les cœurs,
Les mots tendres sèchent les larmes.
Pour faire revivre l’Espoir,
On n’a qu’à parler d’Espérance !
On n’a qu’à clamer l’existence
Du bonheur pour en faire avoir !
Quand le timbre du cœur s’y mêle,
Ces mots-là chacun les entend,
Même un étranger les comprend,
Ils sont de langue universelle !
Mais s’ils n’ont le timbre du cœur,
Si son accent d’amour n’y passe,
Ce n’est qu’un bruit inefficace
Que n’écoute point la Douleur.
Ils restent alors sans réponse ;
Ils ne sont alors que des riens ;
Mais les mots sont magiciens
Quand c’est le cœur qui les prononce.
Mathilde DELAPORTE.
Paru dans Les Causeries en 1927.