Lettre de deuil

 

 

                                        Pour ma bonne amie Blanche,

                                               après la mort de sa mère.

 

 

TU m’écris en pleurant, pauvre petite sœur.

Les adieux de ta mère et le deuil de ton cœur.

 

Il me semble te voir, belle dans ta tristesse,

Avec des yeux mouillés d’implorante détresse.

Rechercher « son » regard qui ne te sourit plus

Et qui s’en est allé vers la paix des élus.

Je te vois sur son front pencher ta tête blonde

Et lui dire « Maman » sans qu’elle te réponde.

Alors, ta gorge étouffe un douloureux sanglot

Et tu pleures longtemps sans murmurer un mot.

Oh ! je te comprends bien. Ta douleur est immense

Comme l’amour dont elle a laissé la semence

Dans le fond de ton cœur affectueux et bon.

 

Je sais que ça fait mal quand les mères s’en vont ;

Mais vois-tu, si vers lui le bon Dieu les rappelle,

C’est qu’elles ont gagné leur couronne immortelle

Et qu’il est temps qu’elles jouissent du repos

Au pays où les chants sont plus purs et plus beaux.

Et puis, rappelle-toi, lorsque ton âme pleure,

Qu’une grande ouvrière entre dans ta demeure

Et que l’âpre douleur en te faisant pleurer

T’apporte en même temps le trésor avéré

D’une âme renaissante et plus forte et sereine,

Qui te rend à nos yeux plus grande qu’une reine.

 

La souffrance, vois-tu, chère petite sœur,

Auréolant ton front aura grandi ton cœur.

 

 

                                                         Octobre 1911.

 

 

 

Alphonse DESILETS, Mon pays, mes amours, 1913.

 

 

 

 

 

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