Hué des chiens
À l’homme trop soumis et trop bon serviteur
Le chien chasse le pauvre ainsi qu’un malfaiteur.
On voit souvent, le soir, par les sentiers de sable
Qui mènent aux maisons, un pauvre misérable
Venir à pas traînants et de ses doigts craintifs
Heurter la porte close à petits coups furtifs.
Il demande à loger. Sèchement on s’excuse.
Et si le mendiant, lassé qu’on lui refuse
Se jette à deux genoux avec les yeux en pleurs,
Suppliant que pour Dieu l’on calme ses douleurs,
Sur lui, brutalement, on referme la porte
Avec un ris moqueur et méprisant, de sorte
Que le chien inconscient de cette cruauté
Interdit le perron avec docilité...
Et c’est pourquoi le Christ a jeté l’anathème
Aux riches dont l’orgueil ne daignerait pas même
Dire un bon mot de charité !
Alphonse DESILETS, Mon pays, mes amours, 1913.