Le rivage
C’EST lui le grand témoin des drames maritimes.
Lui pour qui tant de fois ont chanté les marins
Et qui vit sur l’immensité des flots sereins
Tant de levers d’aurore et de couchers sublimes.
Des pas se sont empreints sur le sable argenté
Qu’ont effacés les vents, et nulle trace humaine,
Après que la marée eut promené sa traîne,
N’est restée en ce lieu d’âpre virginité.
On dirait qu’en ce coin de nature inviolée
La vague, à prolonger ses haltes se complaît,
Quand au sable se colle sa lèvre de lait
Dans le calme émouvant d’une nuit étoilée.
C’est ici que Dieu parle un langage connu ;
Ici que l’on comprend les éclats de sa voix.
Qu’on frappe sa poitrine et que l’on dit : « Je crois ! »
Lorsqu’au rivage vierge un soir on est venu !
LE LAC, novembre, 1911.
Alphonse DESILETS, Mon pays, mes amours, 1913.