Au vent d’octobre
HONNI soit-tu, vent orageux
Qui prend les monts par les cheveux
Et les tortures !
Les poèmes d’or et de feu
Qu’à l’aube claire écrivit Dieu
Tu les ratures !
C’est toi qui par les mornes nuits
D’octobre, hèles ou poursuis
Les gueux sans nombre
Qui vont, titubant, mais sans bruit
Vers un repos lointain qui fuit
Au fond de l’ombre !
Tu troubles jusqu’en leurs clochers
Les bronzes lourds qu’ont attachés
Les cordes saintes ;
Et le tocsin qu’on a perché
Là-haut, te sentant approcher.
Grince ses plaintes !
Honni sois-tu des matelots
Que tu perdis au sein des flots
Dans les orages !
Combien de fois, rampant sur l’eau,
Vins-tu souffler le clair falot
Sur les rivages ?...
Les temps viendront qu’ont attendus
Les bras humains vers toi tendus
Pour te maudire.
Les temps viendront où, chien mordu,
Tu tomberas, râlant, tordu,
Dans ton délire !
Alors, traînant les mêmes fouets
Dont tu frappas les Christs muets
Sur les calvaires,
La mort t’imposera d’arrêt
Dans un formidable soufflet
Ses lois sévères !
Alphonse DESILETS, Mon pays, mes amours, 1913.