Tourne un peu devers moi…
Tourne un peu devers moi ton regard pitoyable,
Soleil, père de vie, en qui seul je m’attans ;
Sers de guide à mes sens esgarez et flottans
Par les bancs périlleux du monde misérable.
Purge et guari mon âme, hélas, presque incurable !
Prive mon cœur troublé de désirs inconstans
Et d’espoirs enchanteurs, qui m’ont faict si long-tans
Battre l’air, peindre en l’onde et fonder sur le sable.
Je cognoy bien ma faute et la vay maudissant ;
Mais pour m’en garentir je me trouve impuissant,
Le monde en ses erreurs trop encore m’enserre.
Si l’esprit quelquefois veut s’eslever aux cieux,
Tousjours derrière moi je retourne les yeux
Comme la femme à Lot ayant quitté sa terre.
Philippe DESPORTES.
Recueilli dans Anthologie de la poésie catholique
de Villon jusqu’à nos jours, publiée et annotée
par Robert Vallery-Radot, Georges Grès & Cie, 1916.