Le glas
Les temps sont accomplis : semons les roses noires,
Menons partout le deuil de l’augural trépas ;
Sur les marches du Rêve il n’est plus de beaux pas,
Et l’Homme est sans grandeur dans l’univers sans gloire.
Les longs cris se sont tus qui traversaient l’Histoire ;
Impuissant à grandir nos gestes ici-bas,
L’Art déserte sa cause et les vastes combats
Et retombe à la fange où les pourceaux vont boire.
Loin d’un monde où plus rien ne brûle que de vil,
Le Génie a gravi de lumineux exils :
À l’horizon des fronts l’idéal agonise
Comme un soleil se couche, en des lagunes d’ors,
Et la nuit, jusqu’au ciel, élève son église
Où le silence est dit pour le repos des morts.
Léon DEUBEL, Poèmes choisis.
Recueilli dans les Suppléments à l’Anthologie
des poètes français contemporains, 1923.