Tu souffres
Tu souffres, ô mon cœur, tu souffres. Eh ! bien, pleure.
Rentre en toi-même, et rentre en ton ennui !
Autrefois je bravais d’un sourire les heures :
Mon rêve et mon espoir faisaient face à la nuit.
Les dieux hospitaliers, les dieux de ma jeunesse,
Longtemps, m’ont soutenu de leur force d’en haut.
La prière et l’amour guérissaient mes tristesses :
Je chantais la bonté dans mon cœur plein d’échos.
Les arbres murmuraient des oraisons, des grâces,
Et je me consolais d’un rayon de soleil ;
Aujourd’hui devant moi les beaux chemins s’effacent
Ma pauvre âme est atteinte et d’ombre et de sommeil.
Ah ! que me reste-t-il de la foi de mes rêves ?
Et que me reste-t-il d’avoir tant espéré ?
J’espère encore en Dieu, bien que l’heure soit brève,
Je sais qu’il faut pleurer après avoir pleuré.
Quand je parle de moi je parle aussi des autres ;
Ô, nous tous, mes amis, qu’allons-nous devenir ?
Je veux revoir Jésus avec ses douze apôtres
Pour en savoir un peu plus long sur l’avenir.
Quand Il prêchait, le bon passant de Galilée ;
Quand Il pleurait au parc de sa Gethsémani ;
Quand Il priait tout bas, telle, colombe ailée,
Son âme s’élevait vers le Père infini ;
Comme lui nous faisons aussi notre prière ;
Comme lui vous prêchez la paix et la bonté ;
Comme lui tu boiras la grande coupe amère...
Mais après que fera ta pauvre humanité !
Louis-Joseph DOUCET.
Quinze ans de poésie française à travers le monde,
Anthologie internationale,
textes rassemblés par J. L. L. d’Arthey,
France Universelle, 1927.