Pourquoi, mon cœur...
Pourquoi, mon cœur, gonflé comme une voile au vent,
Souffrez-vous pour si peu de chose, et si souvent ?
Pour si peu, pour un rien que je n’oserais dire,
C’est un émoi cruel qui va jusqu’au martyre :
Le ciel à l’aube était trop pâle ; au soir, trop bleu ;
On murmure « au revoir » et j’ai compris « adieu « ;
On n’a pas semblé voir ma nouvelle toilette ;
On a pris mon baiser sans lever ma voilette ;
On a mal respiré la fleur de mes cheveux ;
On a ri, l’on n’est pas triste au gré de mes vœux ;
On est pensif alors qu’il eût fallu sourire ;
L’air qu’on a n’est jamais celui que je désire...
Ô mon cœur ! soyez doux, soyez juste, pensez
Que nos seuls chagrins vrais sont les chagrins passés.
Nous aimons, ou nous aime, et cela seul importe :
La robe la plus belle est celle que je porte ;
La pâleur sied à l’aube et le bleu sied au soir ;
Si l’on murmure « adieu » je comprends « au revoir « ;
La voilette ne fait pas un baiser moins tendre ;
On n’a point respiré la fleur, on veut la prendre ;
C’est de mes yeux rêveurs qu’on était inquiet ;
Et c’est que j’avais ri si l’on me souriait.
L’avenir est si beau qui pour nous se dévoile !…
Mon cœur, gonflez-vous comme à la brise une voile !
Marthe DUPUY.