Le temple de Lorette
par
Vincent DU VAL
À LA VIERGE
REINE des Célestes Hiérarchies, et l’incomparable entre toutes les femmes. Votre Fils n’eut autrefois en sa Nativité pour tout appartement qu’une pauvre crèche, et pour honorer l’excellence et le pouvoir que vous donne le titre de sa Mère : Il veut qu’aujourd’hui, célébrant la solennité de votre naissance, je vous offre un Temple dont la protection vous appartient. Il est à vous et en cette façon vos intérêts sont mêlés avec mes très humbles devoirs. C’est ce Temple (où s’est opéré le premier mystère de notre salut et que vous avez rendu célèbre par tant de miracles) qui doit être mon asile. Je ne pouvais pas faire paraître au frontispice de ce tabernacle un nom qui me fût plus favorable que le vôtre, pour me défendre de l’ennui et de la médisance ; puis que vous êtes la Protectrice à qui se vouent les plus grands Potentats de la terre. Si ceux qui sont poursuivis rencontrent un refuge assuré dans les lieux sacrés, je ne crains pas que les jaloux ou les impies osent m’attaquer étant si proche de vos Autels, où je présente cet ouvrage dans lequel comme en un tableau, j’ai tâché de tracer l’abrégé de l’histoire de votre maison de Lorette, en mémoire des bienfaits que toute la France reçoit de votre assistance et particulièrement pour vous faire une reconnaissance publique des faveurs que la Confrérie de Lorette, fondée au Temple de Paris, a reçues de vous. J’ai regret que les termes de ce Poème ne sont pas assez magnifiques pour répondre à la dignité de son sujet. Votre bonté m’en excusera, puisque dans le Ciel (où vous êtes) on ne considère pas la grandeur des offrandes, mais la pureté des intentions, et que Dieu se plaît de faire achever parfaitement le Panégyrique de ses louanges par l’agréable bégayement des enfants à la mamelle. Ces considérations me donnent la hardiesse de vous dédier cet Hymne que vous aurez agréable avec le vœu que je fais d’être toute ma vie :
Votre très humble,
très dévot et très zélé serviteur.
DU VAL.
L E
T E M P L E
D E
L O R E T T E.
H Y M N E.
VIERGE laissant le soin aux Anges,
De chanter ta Virginité,
Si pure en sa fécondité
Qu’elle surpasse nos louanges,
Par un téméraire projet
Je ne prends pas pour mon sujet
Ton mérite et ton excellence,
Mais cherchant un lieu d’Oraison,
Si mon zèle m’oblige à rompre le silence,
C’est pour te saluer en ta sainte maison.
Que la nature et l’industrie
Ont fait d’admirables accords
Pour élever son vaste corps
D’une si juste Symétrie !
Ce grand Dôme qui me ravit,
Figure la Tour de David,
Et les voûtes de ces Chapelles
Semblent autant de boulevards
Pour défendre ce lieu contre les infidèles
Qui voudraient attenter sur ces divins remparts.
Qu’il fait beau dans ce riche temple
Où l’art secondé des Trésors,
Par ses grands et nobles efforts,
Laisse un Chef-d’œuvre sans exemple !
Ici le Peintre industrieux,
Là le Sculpteur laborieux
Semblent se disputer la gloire :
Et l’on dirait que leur travail,
Méritant un renom d’Éternelle mémoire,
Enchérit sur le prix de tant d’or et d’émail.
En ce saint lieu le peuple abonde
Et sans redouter les dangers,
Mille Pèlerins étrangers
S’y rendent des confins du monde,
Trouvant en cet éloignement,
Sans l’aide d’aucun truchement
Pour les Médecins de leurs âmes,
Ceux à qui pour ces fonctions
L’Esprit Saint enseigna comme en langues de flammes
L’Idiome divers de toutes nations.
Je suis ravi quand je contemple
Une maison sans fondement
Qui contre tout raisonnement
Subsiste au milieu de ce Temple.
Bramante, Architecte divin,
Qui sus par une heureuse fin
Couronner ce superbe Ouvrage,
Ce secret que tu ne sais pas
Est un fameux écueil qui marque ton naufrage
Et brise malgré l’art ta règle et ton compas.
En vain, peuple de Recanate,
Tu veux lui donner du soutien,
Puisque par un secret moyen
Ton mur de brique se dilate.
En vain, CLÉMENT, ta sainteté
Lui témoigne sa piété
Par un balustre magnifique ;
Car le marbre sans se briser
S’écarte en respectant ce Palais Angélique
Où le Verbe divin daigna s’humaniser.
Visitons la Chambre natale
Où fut la fille de Sion,
Pure dans la corruption
À notre Origine fatale.
C’est la maison brillante d’or
Plus sainte qu’Horeb et Tabor,
De la Palestine venue,
Et de qui la solidité
Se traça dans les airs une route inconnue.
Pour recevoir de nous le respect mérité.
Mais l’accès m’en semble impossible,
Profane pécheur, qu’ai-je dit ?
Ce Temple qui m’est interdit
Doit être un lieu saint et terrible.
Je suis surpris d’étonnement
Et je sens un frémissement
À l’abord de ce tabernacle ;
Il n’y faut entrer que pieds nus
Comme sur la montagne où jadis par miracle
Moïse vit de Dieu les rayons inconnus.
Quelle merveille en la nature
D’avoir vu ces murs honorés
Dessus des nuages dorés
Rouler sans perdre leur structure !
Lorsqu’en ces hautes régions,
Où Dieu selon nos actions
Fait ou la manne ou le tonnerre,
Confondant l’humain jugement,
Lui-même suspendit cette masse de terre,
Contre l’ordre prescrit à ce lourd élément.
Comme après l’offense punie
D’un siècle insolent et pervers,
Pour réparer cet Univers,
L’Arche vint aux monts d’Arménie,
Après ce châtiment fatal
Dieu remit au Ciel de cristal
Les Eaux, Instruments de son Ire,
Et l’Iris pour marque de paix
Étala ses beautés dedans ce vague Empire
Dont le calme constant fut promu pour jamais.
Telle cette maison divine,
Au grand plaisir des Esclavons,
Vint reposer dessus leurs Monts
Au sortir de la Palestine,
Quand l’Orage aux champs Syriens
Eut ravagé tous les Chrétiens
Par la fureur des Infidèles
Et qu’après ce triste accident,
Dieu pour nous faire part de ses grâces nouvelles,
Rassura par ce don l’Empire d’Occident.
Jadis le golfe Adriatique
Était l’effroi des Matelots,
Ayant depuis calmé ses flots
Se peut appeler pacifique ;
Car la Vierge dans ce trajet
Aux fières tempêtes Sujet,
Lui fit perdre aussitôt ses rages,
De là vient que nous y voyons,
Au lieu du reste affreux des funestes naufrages,
Flotter paisiblement le nid des Alcyons.
Vous de qui la haine immortelle
Veut dans les siècles à venir
Garder un lâche souvenir
À vos ennemis trop fidèle,
Retiendrez-vous la passion
Dont l’orgueilleuse émotion
S’oppose à la Miséricorde ?
Si les vents les plus furieux
Avec les flots mutins demeurent en concorde,
Et s’apaisent pour plaire à la Reine des Cieux.
Aussitôt les peuples Tersactes
Reconnurent la sainteté
Du Temple, dont la nouveauté
Voulait des recherches exactes.
Ils lui donnèrent tous leurs soins,
Et par des fidèles témoins
Autorisèrent son miracle
Et le rendirent si fameux
Qu’on venait chaque jour en ce saint Tabernacle
Offrir de toutes parts des présents et des vœux.
Mais les fatales destinées
Voulurent que l’astre du jour,
À peine en son oblique tour
Avait achevé trois années,
Que par un céleste décret
Ou pour quelque crime secret,
Ils perdirent cette arche sainte,
Perte qui leur demeure au cœur,
Avec tant de regret si vivement empreinte
Que le secours des ans n’en peut être vainqueur.
Après dans la forêt d’Ancône,
La Vierge vient choisir sans bruit,
Dans le silence de la nuit,
Une montagne pour son trône.
D’abord les arbres fastueux
Par un devoir respectueux
Fléchissent leur superbe tête,
Et de leur propre mouvement
Font ce qu’en sa rigueur la plus forte tempête
N’eût pas exigé d’eux dans son dérèglement.
La Lune dans son char d’Ébène,
Enrichi d’ivoire et d’argent,
Montrait dans son cours diligent
La beauté qui la rend si vaine.
Mais rencontrant au Ciel ces murs
Si diaphanes et si purs,
De la nuit elle prit les voiles,
Ne pouvant pas souffrir l’aspect
De celle qui surpasse en beauté les Étoiles,
Et devant qui tout astre éclipse avec respect.
Alors dans cette nuit sereine,
Parurent de rares splendeurs,
Qui firent connaître aux Pasteurs
Le Temple errant de notre Reine.
Pasteurs, votre condition
Est en diverse occasion
Mystérieuse dans ses veilles,
Puisque les premiers en ces lieux
Vous eûtes le bonheur d’admirer les merveilles
Du transport du Palais de la Reine des Cieux.
Quand pour terminer cette guerre
Qui commença par nos aïeuls
Dieu pour nous élever aux Cieux
Daigna s’abaisser sur la terre,
Si des Bergers eurent l’honneur
De rendre hommage à la grandeur
Du Roi naissant dans une étable,
Fallait-il pas avec raison
Que des Bergers aussi, d’un zèle véritable,
Saluassent leur Reine en sa sainte maison ?
La Forêt devenant sujette
À l’insolence du brigand,
Par un miracle encor plus grand,
Ce saint Temple fit sa retraite,
Laissant ses vestiges sacrés
De diverses fleurs diaprés,
Qui jetaient des odeurs divines,
Et lors dans cet affreux séjour
On vit un beau parterre environné d’épines,
Où jadis notre Reine avait tenu sa Cour.
Sortant de ces lieux solitaires
Pleins d’accidents si périlleux,
Ce sanctuaire merveilleux
Se repose au mont des deux frères.
Mais l’intérêt de ces esprits,
Mêlé d’un profane mépris,
Leur ravit ce saint édifice.
Ainsi cette haine de mort,
Qu’allumait en leur âme une lâche avarice,
En causant son départ les mit tous deux d’accord.
Enfin dans le champ de Lorette
Où nous rencontrons aujourd’hui
Notre refuge et notre appui,
Ce temple choisit son assiette.
Champ rempli de fécondité
Réparant l’infertilité,
De l’Éden fertile et champêtre,
Champ, dis-je, de qui le saint lieu
Sert d’illustre Théâtre où nous voyons paraître
Les immenses grandeurs de la Mère de DIEU.
Souvent la nuit de sa naissance
Sur ce Temple miraculeux,
Le Ciel étale mille feux
Témoins de sa réjouissance.
Ces feux célestes ont surpris
Les Pèlerins qui les ont pris
Pour quelque nouveau météore
Qui décorant ce beau séjour,
D’un éclat inconnu plus charmant que l’Aurore,
Prétendait sur les droits de l’empire du jour.
Toi qui poursuivant ta carrière,
Par des plaines d’or et d’Azur,
Conduis ce char brillant et pur
Qui porte en tous lieux la lumière,
Si la nuit montre des splendeurs,
Si le désert produit des fleurs,
Si la mer calme sa furie,
Si des troncs d’arbres sont pieux,
Soleil, ne dois-tu pas en faveur de MARIE,
Dans ces soins complaisants paraître industrieux ?
Quand les Équinoxes arrivent
Aux saisons des fleurs et des fruits,
Et qu’alors les jours et les nuits
Avec justesse s’entre-suivent,
Cet astre au sortir d’Orient,
Avec un visage riant,
Vient saluer cette Princesse,
Et par derrière son Palais,
Pour rendre ses devoirs à sa chère Maîtresse,
Il jette ses rayons plus brillants que jamais.
Non content de ce seul hommage,
Avant que d’achever son tour,
Il revient en ce même jour
Honorer au soir son Image.
Et plus lumineux qu’au Levant
Ses rais opposés au devant
Passent la fenêtre Angélique,
Ainsi par son cours ordonné
Le Soleil nous invite à la fête publique
De la Mère naissante et du Fils incarné.
Jadis tes champs (triste Idumée)
Ruisselants de lait et de miel,
Aujourd’hui de sang et de fiel,
Déshonorent ta renommée.
Ta perverse incrédulité
Et ta lâche infidélité
T’ont ravi ce précieux gage :
La gent qui porte le turban,
Ne pouvant pas souffrir qu’on lui rendît hommage,
Lui fit choisir Lorette et quitter le Liban.
Mais toi bienheureuse Italie
Vrai Paradis de l’Univers,
Prends ce joyau tombé des airs
Par qui ta gloire se publie.
Qu’il n’échappe pas de tes mains,
Que le discord des deux Germains
Par leur malheur te rende sage,
Que la paix chez tes Potentats
Te conserve à jamais l’honneur et l’avantage
D’avoir ce don du Ciel au sein de tes états.
Mortels si la faiblesse humaine
Vous accable d’infirmités,
Aux pressantes nécessités
Réclamez ici votre Reine.
Si vos crimes ont quelquefois,
Par le mépris des saintes Lois,
Rendu son Fils juge sévère,
Son entremise peut soudain
Aux plus grandes ardeurs de sa juste colère
Faire choir par pitié les armes de sa main.
Vous qui d’un supplice barbare,
Faites avec tant de travaux,
De vos coffres de vains tombeaux,
Où se perd votre cœur avare,
Entrez dans cette maison d’or,
Où de la grâce est le trésor
Qui peut seul enrichir vos âmes.
Cet or a des rais si divins
Qu’il prend sa pureté dedans ces vives flammes,
Où sans se consumer brûlent les Séraphins.
Vous qui languissez sans remède,
Lubriques, dont les sens pervers
Forment de l’aliment des vers
Ce beau démon qui vous possède,
Si par des sentiments Chrétiens
Vous jetez au feu les liens
Où votre franchise est périe,
Vous ne trouverez rien de beau
Que dans la pureté des attraits de MARIE,
Que son fils dispensa des rigueurs du Tombeau.
Pauvres squelettes déplorables
Qui combattez contre la mort,
Croyant repousser son effort
Bien que vous soyez incurables,
Vives Images du trépas,
Morts vivants qui, ne mourant pas,
Vivez sans espoir de remède,
Les Médecins vous sont mortels,
Mais en votre faveur si la Vierge intercède,
La santé se retrouve au pied de ses Autels.
Vous qui poussés d’un gain sordide,
Esclaves de vos matelots,
Passez sur l’empire des flots,
La Zone froide et la torride,
Si quelque subit changement
Fait de ce perfide élément
Tout un théâtre de naufrages,
MARIE est l’Étoile du nord
Dont l’aspect gracieux apaisant les orages
Fait renaître le calme et surgir à bon port.
Vous qui dans des horreurs funèbres
Traînez un malheureux destin
Pour qui jamais n’a de matin
L’Astre qui bannit les ténèbres,
Aveugles qui ne voyez pas
Mille couleurs dont les éclats,
Ont une beauté nonpareille,
La Vierge est un Soleil qui luit
Pour vous communiquer l’agréable merveille
Du jour qui peut chasser une si longue nuit.
Vous qui dans la sombre demeure
D’une affreuse et profonde tour,
Interdits de l’air et du jour
Mourez mille fois en une heure,
Vous recevrez la liberté
Et les douceurs de la clarté,
Contre toute apparence humaine,
Si d’un zèle dévotieux,
Vous cherchez le secours de cette Souveraine
Qui ferma les enfers et nous ouvrit les Cieux.
Vous dont la valeur magnanime
Est le salut de vos états,
Contre les lâches attentats
D’une entreprise illégitime,
Si dans des périls apparents
Vous remettez vos différends
Au succès douteux des batailles,
MARIE assurera vos cœurs,
Maintiendra vos Sujets, gardera vos murailles,
Et de vos ennemis vous rendra les vainqueurs.
LOUIS, le plus grand des Monarques,
Sitôt qu’il eût d’un cœur pieux
Réclamé la Reine des Cieux,
N’en vit-il pas d’heureuses marques
Quand deux rejetons d’Oliviers
Se mêlèrent à ses Lauriers,
Cueillis dans les champs de la gloire ?
Depuis on peut dire de lui
Qu’il va, qu’il voit, qu’il vainc, et laisse dans l’Histoire
Des preuves que la Vierge est son unique appui.
La mémoire qui l’éternise
Passe les bornes du Soleil,
Et dit que ce Roi sans pareil
Est le fils aîné de l’Église.
La VIERGE qui règne en son cœur
Le comble de tant de bonheur
Que l’on nomme ce Prince juste
Punisseur de rébellions,
Asile d’opprimés, et par un titre auguste,
Dompteur de Léopards, d’Aigles et de Lions.
Au-delà des Monts Pyrénées
On voit ce Prince généreux,
Avecques des succès heureux
Porter ses armes fortunées.
En vain pour arrêter son cours,
L’Espagne oppose du secours,
De qui la pompe est ridicule.
Car malgré Naples et Milan,
Notre empire étendu jusqu’aux bornes d’Hercule,
Ajoutera MADRID au joug de PERPIGNAN.
Qui n’eût dit que les perfidies
Des ingrats et lâches sujets
Eussent terminé leurs projets
Par de sanglantes Tragédies
Si le Roi veillant pour l’État
N’eût de cet infâme attentat
Découvert les funestes pièges,
Et si par des soins providents,
La VIERGE, prévenant ces âmes sacrilèges,
N’eût écarté de nous ces tristes accidents ?
Justes arbitres de la gloire,
Fameux et divins écrivains,
Sans vous mes efforts seront vains
Si vous n’achevez cette Histoire.
Pères de l’immortalité,
Qui donnez l’honneur mérité,
Aux objets dignes de vos vieilles,
En cet Ouvrage prenez part,
Et dessus un sujet si rempli de merveilles,
Étalez dignement les beautés de votre Art.
Courez cette illustre carrière
Ouverte à tous les beaux esprits,
Puisque les honneurs et les prix
Vous attendent à la barrière.
Dans cet exercice, Chrétien,
Vous aurez pour ferme soutien
Et pour arbitre favorable
L’Auguste et sage RICHELIEU,
Dont la magnificence aux siècles mémorable,
Préviendra les faveurs de la Mère de DIEU.
Publiez donc que ces Images,
Lampes, Portraits, Villes, Châteaux,
De tant de miracles nouveaux
Nous confirment les témoignages.
Laissez ces marques à jamais
Pour la mémoire des bienfaits
Rendus aux peuples comme aux Princes,
Et que l’on accroisse ces lieux,
Pour conserver les dons que toutes les Provinces,
Viennent offrir sans cesse à la Reine des Cieux.
Que par vous aux terres étranges,
Les plus infidèles mortels
Fassent ériger des Autels
À l’Impératrice des Anges.
Et qu’ils implorent son secours,
Dans les malheurs où tous les jours
La faiblesse humaine est sujette,
Et de cette Société
Que l’exemple dévot en l’honneur de Lorette
Les force d’imiter sa rare piété !
La Reine des Villes du monde,
PARIS, pour son soulagement
Et le commun contentement
De tant d’hommes, dont elle abonde
Suivant cette émulation,
A fondé par dévotion
Dans le TEMPLE une Confrérie,
Où sous l’aveu des Chevaliers,
Ainsi que dans Lorette on reçoit de MARIE,
De ses rares faveurs les effets singuliers.
Protecteurs du saint Évangile,
Fermes colonnes de la foi,
Qui donnez aux Sultans l’effroi,
Sans sortir même de votre Île,
Vous qui devez nous maintenir,
Daignez donc si bien nous unir
Dans la charité de nos Frères,
Que la Vierge en l’éternité,
Nous fasse recueillir le fruit de nos prières,
Et jouir des vrais biens de la félicité.
Vous l’ornement de tant de lustres,
Grand Prieur dont les actions
Entre ces Chrétiens Champions,
Passent celles des plus Illustres.
La PORTE, dont le bras puissant
A fait éclipser le croissant
Par tant de beaux faits sans exemple,
Que votre générosité
Consterne les autels de LORETTE et du TEMPLE,
Et consacre leur Gloire à la Postérité !
Vous, chers frères qui pleins de zèle
Venez visiter ces saints lieux,
Rendez à la Reine des Cieux
Un service toujours fidèle,
Gravez son beau nom dans vos cœurs,
Et que le prix de ses faveurs,
À ce saint devoir vous anime,
Car le secret de bien mourir
Consiste seulement à tenir pour maxime
Que celui qui la sert ne peut jamais périr.
F I N.
Cliens Mariæ nullus æternum perit.
Vincent DU VAL,
Le temple de Lorette, 1642.