Crucifixion
Et maintenant une heure sonne,
Est-ce pour tous, est-ce pour toi ?
Dans une ville que l’on voit
Dorée dans l’air comme une automne ;
Et maintenant une heure sonne
Sur des remparts dressés tout droits,
Et chauve un mont monte là-bas
En sable blanc dans des viornes.
Mais à présent venus des hommes
Et des femmes, et des soldats.
Des menuisiers avec du bois
Et des juges en robes jaunes,
Alors on a planté des croix,
Est-ce pour tous, est-ce pour toi ?
Et ciel soudain s’étant fait poix,
L’éclair luit et voici qu’il tonne.
Or six heures d’après-dîné
Et plein de mouches qui bourdonnent,
Expirant les crucifiés
Sur leur bois pieds et mains cloués,
Celui avec au flanc sa plaie,
Au front sa couronne d’épines,
Lève la tête et puis l’incline
Et dans un cri l’âme exhalée,
Meurt au monde tendant les bras.
Est-ce pour tous, est-ce pour toi ?
Max ELSKAMP, Les délectations moroses,
Van Oest, 1923.