Noli me tangere

 

 

Marie debout près du tombeau

Au-dehors pleurant

Le visage mangé aux larmes

Reste immobile ainsi longtemps

Le soleil est haut

La rosée sèche et non les larmes

 

Des yeux aux lèvres et au cœur

Qu’il est long et lent

Le miel des larmes

Et leur sel brûlant

Elle n’ose Elle s’interdit

Si le Maître est encore ici

C’est qu’il est bien mort

Mais s’il n’est ici

S’il n’était ici

 

De ceci et de cela

Elle a peur mais fait trois pas

L’oreille vers quoi

Seul un grillon grésille

Un grillon une chanson

Le fer d’un cheval là-bas

Qu’elle n’entend pas

 

Et du tombeau ce silence

Qui la pétrifie

 

Mais la source tout au fond

Pour la plus fine ouïe

Marie l’entend-elle ou non

Froisser son nom dans la nuit

Toute roide elle se penche

Et se brise comme branche

Sur le saint tombeau

 

Deux anges vêtus de blanc

Y sont assis et devisent

Pourquoi pleures-tu

Marie qui ne les voit pas

Répond à leur voix

On m’a pris mon doux ami

Je ne sais où on l’a mis

 

Derrière elle quelqu’un vient

Qui cherches-tu Qui pleures-tu

Elle se retourne

Es-tu gardien

Où l’as-tu mis dis-le moi

J’irai le reprendre

 

Mariam

 

Lame de fond

Au large de toutes larmes

Raz de marée qui se meurt

Aux pieds du Seigneur

 

Rabbouni

 

Ne me touche pas

Je suis et ne suis d’ici

Je sais comment tu m’aimes

Apprends désormais comment

Le plus proche le tout lointain

Tu l’aimeras

 

 

 

Pierre EMMANUEL, Évangéliaire, 1961.

 

 

 

 

 

 

 

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