Le rêve

 

 

J’AI fait – la nuit dernière – un rêve fort étrange,

Dont je ne me souviens encore qu’à demi.

J’étais je ne sais où sur les rives du Gange,

Et le soir, fatigué, je m’étais endormi.

 

Je sommeillais, je crois, depuis quelques secondes,

Quand une jeune femme, au regard triste et doux,

M’apparut, soulevant le bleu manteau des ondes.

La voyant s’approcher, je me mis à genoux.

 

Une aile de duvet pendait à son épaule.

La sentant m’enlever, je restai stupéfait.

Mais elle, dirigeant son essor vers le pôle :

 

– Ne crains rien. Nous irons voir le monde parfait.

 

 

Combien de temps dura ce voyage céleste ?

 

Je ne sais. Ce matin, quand je revins à moi,

Je pressais sur mon cœur – c’est tout ce qui me reste –

Le rameau toujours vert de l’arbre de la foi.

 

 

Eudore ÉVANTUREL,

Premières poésies, 1878.

 

 

 

 

 

 

 

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