Le soir de la Toussaint
LE soir de la Toussaint est triste à la campagne !
Le voisin est entré, mais quelqu’un l’accompagne.
C’est le curé. La neige a mouillé son rabat.
Son vieux feutre, on le met sur le pied du grabat ;
On balaye, en jasant, les plis de sa soutane.
La mère sait qu’il tousse ; elle offre sa tisane ;
Il refuse. Le père appelle ses garçons.
On fait cercle, d’abord, un peu loin des tisons ;
Et puis, sans le savoir, lentement on s’approche.
Soudain, on croit ouïr les sanglots de la cloche.
C’est pour les morts. On met les enfants à genoux,
La grand’mère, aussitôt, va tirer les verrous,
Et le vieux curé fait, afin que l’on médite,
Le signe de la croix avec de l’eau bénite.
Eudore ÉVANTUREL,
Premières poésies, 1878.