L’aubépine

 

 

Salut, belle aubépine, en la douceur de mai !

Sur le front du coteau par ta fleur embaumé

J’ai cherché ce matin ta blancheur odorante.

C’est pour toi qu’en mon cœur la jeune Strophe chante.

 

Je chante pour bercer ma peine dans ces bois,

Je te chante, aubépine, en songeant qu’autrefois,

Comme toi sur tes bras ta fragile guipure,

Je portais, doux enfant, le lis d’une âme pure.

 

Du lis de pureté l’on est tôt défleuri.

La Vie en ses chemins nous a vite meurtri.

Ah ! combien peu de temps l’innocence légère

Nous fait l’œil lumineux d’une tendre lumière !

 

J’étais une aubépine en fleur en mes douze ans.

Ô brève effeuillaison de mes rêves naissants,

Heure d’aube où vêtu de native noblesse,

J’étais vierge de doute et vierge de tristesse !

 

Aubépine ! aubépine ! en foulant ce penchant

Pourquoi donc ai-je mis ces regrets dans mon chant,

Quand ta suave odeur emmielle la brise

Et que le bourdon d’or de tes bouquets se grise ?

 

Toujours ainsi se mêle au Présent le Passé !...

Je cherchais ta fraîcheur pour mon Rêve blessé,

Mais j’ai vu mon image en ta blancheur divine,

Mon enfance au front pur, ma jeunesse, aubépine !...

 

 

27 mai 1911.

 

 

 

Albert FERLAND.

 

Recueilli dans Les soirées de l’École littéraire de Montréal, 1925.

 

 

 

 

 

www.biblisem.net