À Notre-Dame de Lourdes

 

 

Ô Notre-Dame, ô Vous, Mère bénie

Dont nul enfant, fût-ce le Fils de Dieu,

Ne peut combler la tristesse infinie,

Je vous louerai comme un sublime feu

Que nulle ardeur inquiète n’épuise !

Ah ! que votre flamme exquise conduise

Nos faibles pas vers la Divinité !

Nous sommes loin des calmes tabernacles

Que l’Esprit-Saint remplit de sa clarté,

Mais devant nous vous faites des miracles.

 

Votre tombeau se voile de silence,

Et votre corps, en son Assomption,

S’est envolé comme une rose immense

Jusqu’aux jardins de la neuve Sion !

Mais près du Christ vous pensez à la terre,

Et vous rêvez encor à nos misères

Au pied du trône où règne le Seigneur !

Vous n’attendez point notre mort charnelle

Pour vous montrer à nous, pauvres pécheurs,

Et vous renaissez, ô fleur irréelle !

 

Je vous vois sourire en robe azurée,

Vos yeux sont le ciel, où la goutte d’eau

D’une larme trace une ombre sacrée

Au pied des rocs, vous êtes le roseau

Flexible et bon qui vers l’enfant se penche,

En ravissant son regard de pervenche ;

Votre visage a la calme beauté.

De la pureté ; dans votre auréole

Flottent le parfum de l’éternité

Et l’immense douceur de vos paroles.

 

Dans le matin gris, vous êtes la flamme,

Le soleil nouveau du grand Paradis,

Vous nous annoncez le bonheur de l’âme

Qui se perd en Dieu, mais qui resplendit !

Vous avez fait naître une source, ô Vierge,

Et marcher vers vous la forêt des cierges,

Pendant que la nuit retarde ses pas,

Mais votre bonté comme un flot ruisselle,

Et sur le péché qui pèse à nos bras,

Vous répandez une eau surnaturelle !

 

Car elle éteint par sa vertu les vices

Dont l’insolence a l’éclat des bûchers,

Vous engloutissez leurs tristes délices

Et brisez l’orgueil contre vos rochers !

Tous les surgeons nés des passions fortes

Dans les cœurs emplis de tendresses mortes,

D’où veut monter la vapeur du regret,

Vous les noyez en disant : « Pénitence » !

Et votre fontaine endort le secret

De tous les pleurs dont elle eut confidence.

 

Ceux qu’à vos pieds a conduits l’Espérance,

– Tel un vent léger passant sur la mer –

Et dont tout le corps plonge en la souffrance,

Menez-les vers Dieu dans le matin clair,

Guéris et joyeux, héros d’Évangile ;

Mettez la santé dans leurs mains fragiles

Comme un don charmant de l’Éternité !

Les pleurs vous diront : « Salut, ô Marie,

Nul amour n’atteint votre charité,

Il est heureux le malheur qui vous prie ! »

 

Sous les arches d’or de la basilique

Faites passer la foule des croyants,

Et traversez de flèches angéliques

L’âme qui veut lutter contre les vents

Et s’échapper des terres de la grâce !

Vierge, blessez-la dans sa course lasse,

Dites-lui de croire au Dieu qui guérit

Et qui rend la vie à la terre, à l’onde,

En leur laissant sa Mère qui sourit :

Car votre pitié berce le vieux monde !

 

 

 

René FERNANDAT.

 

Recueilli dans Rosa mystica :

Les poètes de la Vierge,

du XVe au XXe siècle, s. d.

 

 

 

 

 

 

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