À celle qu’on oublie

 

 

       Qui pense à ceux qui ne sont plus ?

Des vivantes cités fuyant les bruits confus,

Qui de la cité morte aime à franchir l’enceinte

Pour prier et pleurer sur une cendre éteinte ?

       Qui pense à ceux qui ne sont plus ?

 

       On te vit belle et gracieuse,

Sourire et t’envoler !... Après quelque printemps,

Qui prononce ton nom dans la foule oublieuse ?

Qui dit les yeux eu pleurs : Hélas ! bien peu d’instants

       On te vit belle et gracieuse !

 

       Qui s’arrête et prie en passant

Sur le tertre qu’ombrage un rosier pâlissant ?

Quels soins ont rafraîchi sa tige qui s’altère ?

Pas même un étranger, un rêveur solitaire,

       Qui s’arrête et prie en passant !

 

       Comme la perle en son écaille,

Qui garde ton image en son cœur attristé ?

Tu fus la fleur d’un jour dont le gazon s’émaille.

Au virginal cercueil tu dors en ta beauté

       Comme la perle en son écaille !

 

       La harpe qu’animait ta voix

Insoucieuse, hélas ! vibre sous d’autres doigts.

Folâtre, elle ne dit sous la main qui l’effleure

Ni cantiques du ciel, ni romance qui pleure,

       La harpe qu’animait ta voix.

 

       En vain, souvenance éternelle

Fut promise à ta cendre avec des pleurs amers ;

Au culte du passé qui demeure fidèle ?

Pour l’homme (être mobile autant qu’un flot des mers),

       Est-il souvenance éternelle !

 

       Reviens doux ange au front voilé,

Ne quitte plus le temple où je t’ai rappelé !

Oui, ce cœur fraternel, plein de mélancolie,

Se souviendra toujours de celle qu’on oublie,

       Reviens, doux ange au front voilé.

 

 

 

Pauline de FLAUGERGUES.

 

 

 

 

 

 

 

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