L’artisan et les oiseaux
Doux chantres de la nature,
Petits oiseaux, tout l’été
Je vous donnais la pâture.
Vous m’apportiez la gaîté.
Les beaux jours vont disparaître,
Mais mon cœur vous est connu :
N’oubliez pas ma fenêtre,
Quand l’hiver sera venu.
Nous avions de douces choses,
Pour déjeuner sans façons :
Vous, du pain frais sous mes roses,
Moi, des fruits et vos chansons.
De notre commun bien-être
Pour toucher le revenu,
N’oubliez pas ma fenêtre,
Quand l’hiver sera venu.
Que de fois, pauvre malade,
J’ai quitté mon oreiller,
Pour vous payer d’une aubade
Qui m’aidait à travailler !
Vous, qui jeûneriez peut-être
Sous les yeux d’un parvenu,
N’oubliez pas ma fenêtre,
Quand l’hiver sera venu.
Un matin, que vos louanges
Montaient vers le Créateur,
Je rêvais qu’avec les anges
Ma mère chantait en chœur.
Ô vous, qui me semblez être
L’écho d’un monde inconnu,
N’oubliez pas ma fenêtre,
Quand l’hiver sera venu.
Votre gaîté, vive et franche,
Peut combattre les autans ;
Mais moi, dont le front se penche,
Verrai-je ou non le printemps ?
J’attends l’arrêt du Grand Maître ;
S’il ne m’est pas parvenu,
N’oubliez pas ma fenêtre,
Quand l’hiver sera venu.
Élisa FLEURY.
Recueilli dans
Recueil gradué de poésies françaises,
par Frédéric Caumont, 1847.