Votre merci
Mot parfumé, plus beau qu’un long poème !
Il m’est venu tout droit de la Bohème...
Dès que ma main toucha les écrits bleus,
Elle sentit votre envoi valeureux
Qui palpitait sous les plis de la page,
Et j’entendis chuchoter le message
Où vous viviez, sans même l’avoir lu...
Lorsque soudain sur mon cœur éperdu,
Votre merci fit choir ses fleurs discrètes,
Pétales clairs tels du soleil en miettes. –
Lors sur mes doigts vint glisser le billet
Où bourdonnait l’énigme d’un secret !
Je l’ai relu sur le vieux banc de pierre
Où s’appuyait une rose-trémière.
L’ai tant et tant redit au cœur du soir,
Près des lauriers aux parfums d’encensoir,
Que chaque fois que je rôde au parterre
J’entends « merci » tomber d’une voix chère.
Il m’a semblé que sur le vélin blanc
Si bien fleuri, c’était du rouge sang
Trop généreux que vous aviez en gouttes
Laissé couler pour effacer mes doutes.
Que vous aviez, chère Âme, offert aussi
Pour colorer d’amour votre merci.
De cet amour excessif puisqu’il tombe
D’un Homme en Croix qui veut guérir un monde !
Sur ce seul mot, mes doigts ont tendrement
De votre cœur palpé le battement.
Je l’ai fait lire au vent afin d’apprendre
À le redire à vous, à vous le rendre
Ce mot tombé comme un œillet cassé.
Voulait-il dire : « Oh ! Yanna, c’est assez
Presser ainsi mon cœur sous de trop franches
Confessions ! Dis ton amour aux branches
Folles d’oiseaux expansifs comme toi ! » –
– Et je reviens encor sous votre toit !...
J’ai bien compris ce que sur chaque lettre
L’ivre saison vous a dicté de mettre :
Affection, ferveur, fidélité,
Il en était chargé ce soir d’été !
J’aime épeler votre âme cristalline
Couchée en fleurs sur la rose opaline !
Et sur l’or pur du merci transparent,
Je viens rythmer pour vous le plus fervent
Merci !
Marie-Anna FORTIN,
Bleu poudre, 1939.