Comme autrefois

 

ROMANCE

 

 

Vieux voyageur sur la houle du monde

J’ai vu sous moi surgir plus d’un écueil ;

Des rêves d’or de ma jeunesse blonde

Plus d’une fois j’ai dû porter le deuil ;

De fils d’argent ma tempe se décore ;

Dans mon gosier je sens trembler ma voix,

Et cependant mon cœur est jeune encore

            Comme autrefois.

 

La fleur fanée avec la feuille morte

M’ont prodigué leurs funèbres parfums ;

Souvent le crêpe a flotté sur ma porte,

Car j’ai pleuré bien des amours défunts.

Pauvres oiseaux de ma lointaine aurore,

En souvenir lorsque je vous revois,

Ah! je le sens, je puis aimer encore

            Comme autrefois.

 

Dieu dans mon sein mit une lyre sainte ;

Des chants nombreux en mon cœur sont éclos ;

Mais souvent l’hymne a fait place à la plainte ;

Ma voix souvent s’est brisée en sanglots.

Hélas! en moi chaque fibre sonore

A sous l’archet saigné plus d’une fois ;

Et malgré tout je veux chanter encore

            Comme autrefois.

 

 

 

Louis FRÉCHETTE, 1876.

 

 

 

 

 

 

 

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