Chant mortuaire
À Henri Pasquier.
Lorsqu’autour de mon corps, d’où le souffle aura fui,
Les cierges jetteront leurs défaillantes flammes,
Dites à Dieu, père des âmes :
« Il a beaucoup souffert, ayez pitié de lui ! »
Lorsqu’au repos sans fin que déjà je réclame
Vous porterez mon cœur fatigué de souffrir,
Dites au Dieu qui peut guérir :
« Il a beaucoup aimé, guérissez sa pauvre âme ! »
Lorsque pour mon cercueil, funèbres ouvriers.
Vous creuserez la terre avide de pâture,
Dites au Dieu de la nature :
« Il fut humble ici-bas, donnez-lui vos lauriers ! »
Lorsqu’avec un bruit sourd une motte de terre
Vous fera réfléchir sur ma fragilité,
Dites au Dieu de vérité :
« Il a beaucoup pensé, donnez-lui la lumière ! »
Paul GABILLARD.
Paru dans L’Année des poètes en 1891.