Les croix de pierre
Au long des vieux chemins meurent les vieilles croix.
Au bord des prés, à l’ombre fraîche des érables,
Sur les vieux murs, au coin d’un champ, au seuil d’un bois
Débris rongés de mousse, informes, vénérables,
Au long des vieux chemins meurent les vieilles croix.
Ô tristesse des pauvres pierres mutilées
Aux abords des hameaux, au cœur des carrefours,
Sur la pente des monts, comme au fond des vallées,
Elles succombent au fardeau des anciens jours.
Ô tristesse des pauvres pierres mutilées
Avec son buste étroit, avec ses bras énormes,
Le Christ gauche et roidi semblait dire aux passants
Voyez, j’ai tant souffert que mon corps est difforme
Et l’homme se signait, grave et compatissant,
Devant le Christ étroit, avec ses bras énormes.
Par les hivers neigeux, la pluie et l’ouragan,
Par les fauves étés brûlant les pâturages,
Douces à l’affligé, douces à l’arrogant,
Les humbles croix de pierre ont traversé les âges,
Par les hivers neigeux, la pluie et l’ouragan.
Les hommes d’autrefois aimaient ces croix de pierre.
Leur main rude étayait les branlants piédestaux
Et toujours réparait la rustique barrière
Où l’herbe croissait libre, où chantaient les oiseaux,
Les hommes d’autrefois aimaient ces croix de pierre.
C. GANDILHON GENS-D'ARMES.
Extrait de Poèmes Arvernes, Éditions U.S.H.A.