Visite à la tombe

 

 

L’eau s’ouvre et se referme, l’eau

s’élève et s’abaisse. Un enfant

y jette un caillou. Aussitôt

l’eau s’élève et l’eau redescend.

 

L’eau s’élève et s’abaisse, l’eau

va s’ouvrant et se refermant.

Tout à fait tranquille redevient l’eau.

Où est le caillou maintenant ?

 

Et la terre s’ouvre et se ferme. La terre

elle aussi s’élève et s’abaisse quand

vient le fossoyeur aux mains mercenaires

pour qu’elle ait son dû, l’ouvrant, la fermant.

 

Et la terre s’élève et s’abaisse. La terre

s’ouvre et se referme et l’on voit

une tombe avec un peu plus de terre

« C’est ici ». Quelqu’un la montre du doigt.

 

Et la terre s’abaisse avec lenteur, la terre

s’affaisse et se ferme à nouveau. À nouveau

tend ses bras vers l’herbe oublieuse, la terre

vers l’herbe qui se redresse bien haut.

 

Et la terre s’ouvre et se ferme, la terre

s’élève et s’abaisse, et bientôt

tout est aussi vert en ce coin de terre

que partout ailleurs où la vie éclot.

 

Où reposerait-il, où est-il, à présent ?

Que dites-vous, ô champ silencieux ?

Où me suis-je caché les yeux en pleurant ?

Où ai-je dit : « Adieu, adieu » ?

 

.  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .  .

 

 

 

 

Guido GEZELLE, Exercices poétiques, 1858.

 

Traduit du néerlandais par Liliane Wouters.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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