Ode imitée des psaumes

 

 

J’ai révélé mon cœur au Dieu de l’innocence ;

          Il a vu mes pleurs pénitents ;

Il guérit mes remords, il m’arme de constance :

          Les malheureux sont ses enfants.

 

Mes ennemis, riant, ont dit dans leur colère :

          Qu’il meure et sa gloire avec lui !

Mais à mon cœur calmé, le Seigneur dit en père :

          Leur haine sera ton appui.

 

À tes plus chers amis ils ont prêté leur rage ;

          Tout trompe ta simplicité ;

Celui que tu nourris court vendre ton image

          Noire de sa méchanceté.

 

Mais Dieu t’entend gémir, Dieu vers qui te ramène

          Un vrai remords né des douleurs,

Dieu qui pardonne enfin à la nature humaine

          D’être faible dans les malheurs.

 

J’éveillerai pour toi la pitié, la justice

          De l’incorruptible avenir ;

Eux-mêmes épureront par leur long artifice

          Ton honneur qu’ils pensent ternir.

 

Soyez béni, mon Dieu, vous qui daignez me rendre

          L’innocence et son noble orgueil,

Vous qui, pour protéger le repos de ma cendre,

          Veillerez près de mon cercueil !

 

Au banquet de la vie, infortuné convive

          J’apparus un jour, et je meurs :

Je meurs, et sur la tombe où lentement j’arrive

          Nul ne viendra verser des pleurs.

 

Salut, champs que j’aimais, et vous, douce verdure,

          Et vous, riant éveil des bois !

Ciel, pavillon de l’homme, admirable nature,

          Salut pour la dernière fois !

 

Ah ! puissent voir longtemps votre beauté sacrée,

          Tant d’amis sourds à mes adieux !

Qu’ils meurent pleins de joie ! que leur mort soit pleurée !

          Qu’un ami leur ferme les yeux !

 

 

 

Nicolas-Laurent GILBERT.

 

Recueilli dans Poètes de Jésus-Christ,

poésies rassemblées par André Mabille de Poncheville,

Bruges, Librairie de l’Œuvre Saint-Charles, 1937.

 

 

 

 

 

 

 

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