L’Angelus

 

CHANSON

 

 

Laboureur, quand la brise en la paix du couchant

Murmure l’Angelus aux échos de la plaine,

Au milieu du sillon qui s’enfonce en ton champ,

Arrête ta charrue et le bœuf qui la traîne ;

Quand les nids attentifs l’écoutent radieux,

Arrête ta charrue et regarde les cieux !

 

        C’est l’Angelus qui passe ;

        Repose ta main lasse

        Et laisse l’aiguillon ;

        Mets dans ton cœur la flamme

        Et fais monter ton âme

        Au-dessus du sillon.

        Repose ta main lasse,

        C’est l’Angelus qui passe.

 

Ô semeur, quand la voix argentine s’épand

Sur le grain où le prix de tes sueurs se fonde,

Au milieu du guéret où tout bruit se suspend,

Pour le froment futur qui nourrira le monde,

Dans le soir recueilli quand la cloche a chanté,

Pour le froment futur, dis, semeur, un Ave.

 

        C’est l’Angelus qui passe ;

        Repose ta main lasse

        D’un labeur sans arrêt ;

        Mets dans ton cœur la flamme

        Et fais monter ton âme

        Au-dessus du guéret.

        Repose ta main lasse,

        C’est l’Angelus qui passe.

 

Moissonneur, quand résonne au-dessus du blé mûr

Le cantique béni qui fait frémir les gerbes

Parmi la moisson blonde et sous le ciel d’azur

Avec le chant du soir qui chante dans les herbes,

Pour tes espoirs comblés, tant que l’airain priera,

Avec le vent du soir dis : Ave Maria !

 

        C’est l’Angelus qui passe ;

        Repose ta main lasse

        Et cesse tes chansons ;

        Mets dans ton cœur la flamme

        Et fais monter ton âme

        Au-dessus des moissons :

        Repose ta main lasse,

        C’est l’Angelus qui passe.

 

 

1917.

 

 

 

Joseph GINGRAS, Fidélité,

Montréal, 1958.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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