Fleurs d’orphelin
Frère, réveille-toi : vois, je t’apporte encore
Ce bouquet : sur ta tombe, avril mit moins de fleurs.
Écoute mes sanglots : sur ta tombe, l’aurore
A versé moins de pleurs.
Vois, je tremble de froid : pas de réponse encore.
Elles vont se flétrir sous mes larmes, ces fleurs !
Tu ne les prends donc pas ? Le soir comme l’aurore
Verra-t-il vains mes pleurs ?
Ah ! l’on dit que ta mort est sans réveil ! Encore,
Si j’étais avec toi dans ce linceul de fleurs
Ainsi, pauvre orphelin, ni le soir ni l’aurore
Ne percevrait mes pleurs.
Mais le ciel l’a voulu, je souffre et vis encore
Et sur moi seul avril viendra mettre des fleurs.
Qui donc priera pour moi ? Quel autre que l’aurore
Aura pour moi des pleurs ?
Dieu du ciel, tu m’entends ! Oui, je l’espère encore,
Tu nous réuniras bientôt. Comme des fleurs
Nous croîtrons dans tes cieux, dans l’éternelle aurore,
Jardins exempts de pleurs.
1916.
Joseph GINGRAS, Fidélité,
Montréal, 1958.