Ma mère

 

 

(Traduit de l’espagnol)

 

 

Il est une beauté que respecte le temps

Quand même le chagrin l’effleure de son aile :

Ainsi ma mère a plus de soixante-dix ans

Et plus je la revois, plus je la trouve belle.

 

Il suffit à mon cœur pour battre à ses attraits

D’un seul mot, un regard, un rire, une posture ;

Ah ! si l’on m’eût appris l’art d’imiter les traits

Je passerais mes jours à faire sa peinture.

 

Je la peindrais à l’heure où, m’inclinant son front,

Je dépose un baiser sur ses cheveux de neige

Ou quand d’un long malaise elle éprouve l’affront

Mais sourit pour cacher la douleur qui l’assiège.

 

Et si mes vœux au ciel ne montaient pas en vain

Ils n’aspireraient pas à demander l’usage,

Illustre Raphaël, de ton pinceau divin,

Pour couronner d’éclat son tendre et doux visage.

 

Non ! Je voudrais changer mon âge avec le sien,

Lui donner la vigueur de mon ardente vie,

Lui donner mon printemps et retrouver mon bien

En voyant, grâce à moi, ma mère rajeunie !

 

 

1917.

 

 

 

Joseph GINGRAS, Fidélité,

Montréal, 1958.

 

 

 

 

 

 

 

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